Produit cent pour cent brésilien, la semence du samba a traversé l’océan Atlantique apportée par les esclaves au milieu du XIXe siècle. C’était à Bahia, où la plupart des africains arrivaient pendant la période coloniale au Brésil, que le samba a commencé à prendre forme. En effet, le mot qui semble être dérivé du nom africain semba, atteste les forts liens entre la musique brésilienne et ses racines africaines.
Texte par Kauê Vieira et Sara Arlindo, Ed. par Flora Pereira (traduction par Arthur Catraio)
L’un des continents les plus complexes du monde, l’Afrique ne peut se résumer ni être traité comme un continent homogène. Avec 54 pays, la région qui a donné naissance à la race humaine détient une diversité culturelle et ethnique peu comparable à d’autres régions de la planète. Pour illustrer ce concept, il suffit tout simplement d’essayer de définir ce que c’est que la culture au Brésil qui, de même que l’Afrique, a reçu des influences très diverses lors de sa colonisation.
Pour garder loin des stéréotypes, il est d’abord nécessaire de comprendre le concept et toute la largeur du mot culture. Selon la sociologie, la culture est tout ce qui résulte de la création humaine, les idées, les coutumes, les lois, les croyances et les connaissances acquises dans la vie sociale. Il n’y a pas de culture supérieure ou inférieure, meilleure ou pire, mais différentes. En comprenant cette idée, il est possible de mieux saisir l’influence de l’Afrique et toute sa diversité au long de l’histoire du Brésil.
Afin d’éviter un approche générique et en même temps superficiel, l’analyse de la présence africaine au Brésil dans cet article se limitera au rythme musical du samba. Bien que le genre musical ait été créé et proprement répandu en terras brasilis, le mot est dérivé du nom africain semba, un des styles musicaux les plus populaires de l’Angola et qui en Kimbundu – une des langues du pays, signifie umbigada. Le semba est caractérisé par des mouvements qui résultent à l’encontre du corps de l’homme avec celui de la femme; l’homme tient sa partenaire par la ceinture et la tire vers lui en provoquant un choc entre les deux, ce qui résulte dans l’umbigada[1]. Cependant, il n’y a pas de consensus sur son origine, vu que d’autres chercheurs affirment que le mot provient de l’oumboundou, une langue parlée par le groupe ethnique Ovimbundu. Descendants des populations bantoues, ils sont arrivés dans la région au début du deuxième millénaire et occupent désormais les régions centrales et côtières de l’Angola.

Comme on peut le voir, l’origine africaine est donc peu similaire à ce qui est devenu le samba Tupiniquim. Produit cent pour cent brésilien, la semence du genre musical a traversé l’océan Atlantique apportée par les esclaves au milieu du XIXe siècle. C’était à Bahia, où la plupart des africains arrivaient pendant la période coloniale au Brésil, que le samba a commencé à prendre forme, le rythme alors appelé batuque, maxixe, chula, entre autres noms, symbolisait la danse. Dans le centre d’un cercle et au son des applaudissements, d’un chœur et d’objets de percussion, le danseur soliste donnait des umbigadas à un compagnon pour lui appeler à danser, en étant par la suite remplacé par ce dernier. C’est à Rio de Janeiro, considéré comme le berceau du rythme le plus populaire du Brésil, qui a pris forme le samba actuel.
Le style a été ramené à Rio lors du début du XXe siècle, apporté par les migrants de Bahia, où il a trouvé son partenaire idéal: le carnaval. C’était le début d’un mariage parfait qui a donné plusieurs fruits dans la musique populaire brésilienne. Le premier succès de samba à être enregistré au Brésil Pelo Telefone, en 1917, chanté par Bahiano avec des paroles écrites par Mauro de Almeida e Donga, a marqué le début du règne de la chanson carnavalesque. Par la suite la composition a été réenregistrée par Martinho da Vila, qui a donné un nouveau visage à la mélodie du début du siècle. La piste a été libérée en 1973 et a fait partie du répertoire du disque Origens.
Cependant, c’était dans les années 1930 que le style est devenu largement apprécié par le peuple. Un groupe de musiciens dirigé par Ismael Silva a fondé, autour du quartier Estácio de Sá, la première école de samba, Deixa Falar. Ils ont transformé le genre, en donnant des contours plus modernes, y compris l’introduction de nouveaux instruments tels que le surdo et la cuica, cela afin de mieux s’adapter au défilé de carnaval. Peut-être le personnage le plus important dans cette histoire soit Noel Rosa, qui a promu l’union entre le samba do morro (littéralement: des collines) et de l’asphalte, c’est à dire les classes les plus pauvres partageaient avec les plus riches l’attraction pour le style. Pour cela, il a compté avec l’aide de la radio, qui à l’époque vivait un de ses moments les plus importants et jouait sans cesse le genre pour les familles brésiliennes. L’une des chansons préférées de tous était Com que roupa?, un samba humoristique qui reste connu jusqu’à nos jours. Qui a également contribué à cette montée de la popularité a été le président Getúlio Vargas, qui appelait le samba “la musique officielle du Brésil. » Ainsi, les grands compositeurs tels que Dorival Caymmi, Adoniran Barbosa et Ary Barroso sont devenus célèbres et appréciés du peuple d’un seul coup.
Au cours du XXe siècle, le samba a été encore plus développé et a suivi dans plusieurs directions, du samba canção aux batteries des écoles de samba. Un des styles le plus notable est la bossa nova, créée par des membres de la classe moyenne de Rio, y compris João Gilberto et Antônio Carlos Jobim. Ces musiciens ont été responsables, pendant les années 1960, par la reprise de l’œuvre des musiciens tels que Nelson Cavaquinho, Zé Keti et Clementina de Jesus, ce qui a fait découvrir au public une gamme d’artistes jusque-là oubliés. À la fin des années 1970 et tout au long de la décennie suivante un tas de nouveaux artistes, comme Martinho da Vila lui-même, Bezerra da Silva, Beth Carvalho et Clara Nunes ont dominé les charts. Après une période de pause – à cause de la musique disco et du rock national brésilien, le samba est revenu au pouvoir dans les années 1980, notamment avec Zeca Pagodinho, Almir Guineto, Fundo de Quintal, Jorge Aragão, Joveilna Pérola Negra, entre autres.
C’est un fait que même aujourd’hui une caractéristique n’a jamais changée: les paroles considérées tristes et qui accompagnées par des instruments à percussion (tambours, surdos et timbau), une guitare et un cavaquinho, continuent à chanter la routine des communautés les plus pauvres, en parlant d’amour, de déceptions et en exaltant l’espoir, caractéristiques remarquables du peuple brésilien. Dû au fait qu’il soit joué avec force et joie, le samba est considéré comme une lamentation joyeuse des noirs. Actuellement le samba est l’un des genres les plus joués, de Nord à Sud, du Brésil et décrit de manière unique la personnalité du peuple brésilien.
“Não deixe o samba morrer, não deixe o samba acabar. O morro foi feito de samba, de samba pra gente sambar.” [2]
[1] Le mot umbigo, en portugais, signifie nombril.
[2] Samba composé par Edson Conceição et Aloísio Silva.
Par Kauê Vieira et Sara Arlindo, Ed. par Flora Pereira, texte du projet Afreaka. Traduction par Arthur Catraio.
Pour en savoir plus et lire le texte original en portugais:http://www.afreaka.com.br/notas/samba-raiz-memoria-e-ligacao-entre-brasil-e-africa/